mercredi, 12 juin 2013 09:19

Economie : la musique dématérialisée

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Economie : la musique dématérialisée
 
"Amis de la musique, les grandes maisons vous ouvrent leurs magasins, et c’est l’Eldorado de la musique virtuelle qui s’offre à vous !
Comme vous, je reçois presque chaque jour des offres mirifiques : on m’informe, on se soucie de mon confort, on veille à ma sécurité. Plus la peine de sortir dans la rue et d’affronter ses périls pour acheter l’album nouveau-né d’un(e) artiste que j’aime, Universal by iTunes et autres marchands d’airs, annoncent que cet album vendu 19 € (mais 16,50 € en prix de lancement à la Fnac ou chez un distributeur survivant) je peux le recevoir direct dans mon ordi, (c’est facile, juste une formalité) pour 1,29 € le titre. Alors, pourquoi s’en priver… Mais voyons ça de plus près : il y a treize chansons, soit 16,77 € en tout, je n’ai certes pas à payer le ticket de métro ou l’horodateur, d’accord, mais… Mais, je n’ai ni livret, ni galette laser, ni boitier, donc… J’ai comme dans l’idée que je me fais un peu arnaquer. Bien sûr, si j’ai une imprimante, des boitiers vierges, si je vais chercher les infos sur le web et me bricole un livret, mal foutu d’accord, j’aurais mon CD physique. A quel prix au total ? ! Ça me coûtera, je le sais, un peu moins si j’achète le tout en mp3, dans les 10 à 11 €. Mais en mp3…
Triste compensation : je ne suis pas le seul à être arnaqué. Avec le CD classique, en digipak, avec livret, l’artiste auteur va percevoir en moyenne dans les 10% du prix d’achat. Dans les nouveaux circuits de ventes numériques, c’est 5,1% (source Adami). L’acheteur paye aussi cher pour un produit dématérialisé que pour un vrai album, mais l’artiste perçoit deux fois moins… Dites, Monsieur Rascal Nègre, d’Univers sale, vous prenez les acheteurs pour des con… sommateurs idiots ?? Si ce n’est pas le cas, c’est bien imité. Plus de frais de stockage, ni d’acheminement ni de réalisation de livret, et le prix reste le même. Y’a comme un défaut, dirait Fernand…

Sidérante cohérence du i-commerce : allons sur Amazon, l’Attila du bizness (là où il passe, les petits commerces ne repoussent pas !), et faisons mine de s’intéresser à… Tiens, la dernière galette de Zaz ! Je lis.
« Recto Verso » Zaz | Format : CD Prix 16,99 € livraison gratuite
2 neufs à partir de 14 €, 1 d’occasion à partir de 16,50 €
Télécharger immédiatement en MP3 pour EUR 8,99.
Si la deuxième ligne vous semble étrange, « 2 neufs à partir de 14 €, 1 d’occasion à partir de 16,50 € », si vous n’y comprenez que dalle, revoyez le sketch de Fernand Raynaud, Les oeufs cassés. Ça a ne vous éclairera pas forcément, mais ça vous fera rire cinq minutes.
Autre détail rigolo, quoi que… Dans les contrats d’artistes, il y a des abattements divers (pour la casse des vinyles, les frais de stockage, les retours, et autres menus désagréments…) qui justifient un abattement sur les droits, ça peut se défendre. Mais quand il n’y a plus de support physique, y’a rien qui se casse, rien qui se perd tombé du camion, rien qui se noie dans une inondation, rien à retourner. Néanmoins ces abattements sont toujours en vigueur dans les contrats ? Vous avez dit arnaque ?
Résumons : les disques et les chansons sont au même prix pour l’acheteur, les coûts sont bien inférieurs pour les producteurs, les droits des artistes diminuent… Messieurs d’Universal, avez-vous une réponse ?
L’acheteur lambda étant bien essoré, les artistes ont aussi leur cycle de pompage.
Le libéralisme a suggéré aux producteurs une autre astuce pour augmenter leur cassette : la cession de créance. En gros, quand un artiste reçoit une avance sur un album, cette avance est remboursée sur les ventes à venir. C’est ce qui se passe depuis des lustres. Mais une nouveauté vient de sortir : la cession de créance. Qu’est-ce ? Imaginons que le producteur ne fasse rien pour vendre cet album, ou que ce disque, pour une raison x ou y, ne rencontre pas la faveur du public (ça arrive assez souvent), l’avance risque ne pas être remboursée. La cession de créance est une sorte de codicille dans le contrat, qui permet de se servir dans d’autres droits d’auteurs, ceux d’albums précédents par exemple, ou ceux des artistes interprètes, une sorte d’hypothèque sur le patrimoine. Comme si l’artiste était seul responsable de la mévente, que le producteur et diffuseur n’y était pour rien…
Je n’ai rien contre vous personnellement, monsieur Pascal Nègre, mais vos récentes condoléances tweetées ont un arrière-goût désagréable, comme si vous aviez vu dans les cercueils de Dutilleux et Moustaki une sorte de tirelire, à vot’bon coeur éploré et passez la monnaie ! Faut pas laisser perdre les bonus cimetières pour satisfaire les actionnaires !" (Norbert Gabriel le 11 juin 2013)


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